Assemblée générale de l’Association départementale des maires et des Présidents de communautés des H-P
En cette période de réforme territoriale et des nouvelles intercommunalités, l’assemblée générale des maires et des présidents des intercommunalités des Hautes-Pyrénées présidée par Viviane Artigalas était très attendue. Rien d’étonnant donc que l’auditorium de la Chambre de commerce et d’industrie était quasiment rempli hier matin pour ce rendez-vous qui s’inscrivait par ailleurs dans le cadre de la journée des maires de la Foire de Tarbes. C’est donc avec beaucoup d’attention que le discours de la préfète a été écouté.
Le discours de Anne-Gaëlle Baudouin-Clerc
Préfète des Hautes-Pyrénées
Il est des rendez-vous qui marquent la vie démocratique d’un département, et celui-ci en fait partie.
Je vous remercie donc, Madame la présidente, de votre invitation.
Elle est pour moi, l’occasion de témoigner une nouvelle fois, avec sincérité, avec conviction, de la reconnaissance qu’au nom de l’État, je souhaite exprimer à chacun d’entre vous, Mesdames et Messieurs les maires, pour l’action que vous conduisez et peut être, plus encore, pour l’engagement qui est le vôtre au service des autres.
Cette assemblée générale intervient au terme d’une année qui demeurera à nulle autre pareille par le déchaînement de violence et de barbarie que notre pays a connu, et par la mise à l’épreuve de nos valeurs républicaines et de notre cohésion nationale.
Plus que jamais, c’est à l’affirmation de ces valeurs, à l’affirmation de notre unité que nous sommes appelés.
Année exceptionnelle aussi, bien sûr, et plus particulièrement dans nos territoires, du fait, de l’impact des réorganisations territoriales et institutionnelles engagées, mais aussi par l’impact des crises agricoles, aussi multiples que profondes.
C’est donc important pour moi, en tant que représentante de l’État, de revenir devant vous sur ces sujets qui appellent entre nous, un dialogue sans relâche et un effort de compréhension réciproque.
Vous m’avez invitée, Madame la présidente, à évoquer la mise en œuvre du schéma départemental de coopération intercommunale.
Cette démarche est structurante pour le département. Je ne méconnais pourtant pas, évidemment, qu’elle suscite des interrogations, des craintes, voire des franches oppositions. Je dois m’en expliquer devant vous.
La loi m’a confié la responsabilité de faire des propositions en m’appuyant sur des critères de population – critères prenant en compte la spécificité des territoires ruraux - et sur l’existence des bassins de vie.
J’ai fait ces propositions sans schéma pré établi, d’abord en écoutant, en rencontrant les 30 présidents d’intercommunalité systématiquement et autant de fois qu’ils me l’ont demandé. Nous avons partagé nos visions, qu’elles aient été convergentes ou non.
Ces propositions ont ensuite été discutées et amendées par la commission départementale de coopération intercommunale dont vous avez, Mme la rapporteure générale, animé et nourri les débats.
Le schéma départemental a été adopté. Je vous ai saisi il y a quelques jours, de projets d’arrêtés de périmètre. Une période de 75 jours est désormais ouverte pour permettre à chaque commune de donner son avis.
Au terme de cette période, à la fin du mois de juin, je réunirai à nouveau la CDCI pour faire le bilan des délibérations, vérifier si les conditions de majorité, définies par la loi, sont réunies ou non et si ce n’est pas le cas, décider avec les élus ce qui doit être fait.
Passer de 30 à 9 intercommunalités et de 120 à 77 syndicats est un pas important, j’en ai conscience.
J’ai aussi la conviction qu’il doit et qu’il peut être franchi – comme beaucoup d’autres territoires l’ont fait avant nous.
Je veux saluer de ce point de vue, l’importance du travail accompli par les territoires qui se sont engagés depuis déjà plusieurs mois, dans l’élaboration d’un projet, cherchant ce qui rassemble plutôt que ce qui divise et ce qui peut être gardé de plus efficace dans les expériences, les histoires, les habitudes, qui sont en train, à travers ces regroupements, d’être partagés.
Et je parle de ce que j’ai constaté, au fil de nos rencontres. La semaine dernière, par exemple avec les élus des CC de Tournay et de Pouyastruc – qui lancent une consultation de chaque maire. Avant-hier, à St Savin, avec ceux de la vallée des Gaves.
Merci à tous ceux d’entre vous qui s’engagent dans ces travaux, dont je mesure bien sûr, qu’ils sont exigeants et complexes, mais riches aussi de votre capacité à imaginer le territoire de demain et son organisation .
Je veux aussi vous dire que l’État sera attentif à rechercher avec vous les marges de souplesse nécessaires : l’année 2017 doit permettre aux nouvelles intercommunalités de se mettre en place et de monter peu à peu en puissance.
Un enjeu important consiste aussi à faire en sorte que le département puisse mieux faire entendre sa voix dans la future grande région, et je pense bien sûr ici à la grande agglomération réunissant Tarbes, Ossun et Lourdes, qui est au cœur du schéma intercommunal.
Là encore, il s’agit de peser pour obtenir des soutiens, pour attirer les investissements, les nouveaux projets, et renforcer la dynamique d’un territoire qui ne doit pas être la périphérie éloignée de l’axe Toulouse-Montpellier.
C’est à vous les élus d’en décider, et de trouver ce qui sera le meilleur, non pas pour gérer un actif ou préserver des acquis, mais pour imaginer un futur, le meilleur pour vos territoires.
Plus que jamais, je crois en votre capacité collective à dépasser les peurs, les craintes, à faire le pari de la simplification et de la construction collective, y compris en dépassant les sujets de gouvernance qui, bien souvent, polluent les débats.
Plus que jamais, enfin, je veux redire avec force que les services de l’État – préfecture, sous préfectures, DDFIP, DDT – ont la responsabilité et le devoir d’accompagner ces changements, par leur expertise, leur éclairage, leur conseil.
2. Je veux évoquer maintenant les questions de sécurité.
La menace terroriste est forte sur le territoire français, plus qu’elle ne l’a jamais été, nous disait il y a quelques jours, le ministre de l’Intérieur réunissant l’ensemble des préfets.
Dans les Hautes-Pyrénées, les services de renseignement suivent une trentaine de personnes radicalisées à des degrés divers. Les perquisitions administratives opérées à mon initiative, en lien étroit avec M. le Procureur, dans le cadre de l’état d’urgence, ont montré que les territoires ruraux n’étaient pas épargnés.
C’est pour cette raison – parce que vous avez besoin d’être informés sur ces réalités - qu’avec Mme la présidente, nous vous proposerons un temps de travail, spécialement dédié aux élus, consacrée à la radicalisation, à sa détection, à sa prévention. Il aura lieu le 6 juin prochain, en fin d’après-midi, dans cette salle.
Sans céder à la peur, nous avons, ensemble, à mieux connaître le risque, dans tous les domaines. Développer la culture du risque, c’est améliorer l’efficacité de la prévention et de la protection. C’est ce que nous avons fait à travers les sessions de sensibilisation autour des « gestes qui sauvent » ou les exercices conduits dans les différentes écoles du département.
Je sais pouvoir compter sur vous pour maintenir et développer cette mobilisation .
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Je veux à présent revenir sur les réponses que l’État mobilise pour construire une ruralité vivante et forte.
Au-delà de la réorganisation territoriale, au-delà de la mobilisation autour des enjeux de sécurité, j’ai trois priorités que je souhaite partager avec vous :
- le soutien à l’activité économique et en premier lieu par l’accompagnement des investissements publics locaux ;
- la consolidation des services aux publics ;
- la jeunesse, en particulier dans les territoires les plus ruraux.
Le soutien à l’activité économique d’abord. C’est un impératif pour un territoire comme le nôtre qui, à l’échelle de la région, voit le nombre des emplois décroître. C’est ce qui soude, évidemment, le projet de territoire impulsé par le président du conseil départemental et réunissant acteurs institutionnels et économiques, sans clivage, sans tabou, autour des atouts des Hautes-Pyrénées. C’est ce qui justifie aussi que nous choisissions des organisations intercommunales suffisamment fortes et structurées.
Ce soutien à l’activité économique, parce que nos entreprises du bâtiment en ont grand besoin, passe aujourd’hui de façon primordiale, par le soutien à l’investissement public local.
Si la contrainte budgétaire doit vous inciter à adapter votre organisation et vos modalités d’intervention, je suis évidemment consciente que l’effort des collectivités territoriales est important, et que certains d’entre vous sont confrontés à des situations difficiles.
Dans notre département, l’année 2015 a été caractérisée par une quasi stabilité des dépenses de fonctionnement des collectivités locales (-0,4%) et l’amorce d’une baisse des charges de personnel (-0,8). Le plus marquant est le net recul des dépenses d’investissement qui ont diminué de près de 25 % sur deux ans.
Dans ce contexte, des mesures exceptionnelles ont été prises au plan national pour 2016 afin de soutenir l’investissement public local.
La hausse exceptionnelle de 200 millions d’euros de la DETR a été confirmée cette année. Un fonds d’un milliard d’euros a été créée pour soutenir les projets des communes et EPCI. Les dépenses d’entretien des bâtiments publics et de voirie ont été déclarés éligibles au FCTVA.
Qu’est-ce que cela signifie en particulier pour notre département ?
La DETR a augmenté de 48 % depuis 2012, et de 35 % sur les deux dernières années. C’est un levier puissant – 1 euro de DETR génère en moyenne 4 euros d’investissement.
Je note avec satisfaction que les demandes de DETR sont en 2016 deux fois plus élevées que l’année dernière... un niveau d’ailleurs jamais atteint, si j’en crois la mémoire des gestionnaires de la DETR qui m’entourent !
C’est une bonne nouvelle, cela veut dire que vous recommencez à programmer des investissements...mais c’est aussi la certitude d’avoir à faire des choix, parfois difficiles – c’est pourquoi j’ai décidé de réunir, dans quelques jours, la commission des élus, afin de leur présenter l’état des lieux et d’arrêter ensemble quelques orientations de principe.
Au niveau du préfet de région, c’est une enveloppe complètement nouvelle de 75,4 millions d’euros qui viendra soutenir l’investissement local.
Une première réunion s’est tenue hier à Toulouse – ses conclusions sont encourageantes...le message est clair cependant : plus nous saurons convaincre de notre capacité à engager des dossiers rapidement sur des projets structurants, plus nous obtiendrons de financements !
Soutien à l’activité économique aussi en accompagnant les démarches structurantes. Je pense par exemple, à ce que nous avons initié avec la maire de Lourdes et l’ensemble des collectivités pour tenter de revisiter ensemble le « modèle économique » lourdais.
Soutien à l’activité économique enfin s’agissant de l’économie agricole. Notre agriculture, qui joue un rôle si structurant dans nos territoires, est confrontée à une concomitance de crises sans doute sans précédent, qui appelle à la fois des réponses immédiates, une attention extrêmement ferme pour éviter des contraintes administratives inutiles, mais aussi des réflexions plus stratégiques sur le devenir de notre agriculture à conduire avec tous les acteurs. S’agissant des éleveurs de la filière volailles, l’État a mobilisé une enveloppe de 130 millions d’euros : vous est remis ce matin une plaquette d’information qui récapitule les différentes aides mobilisables.
Deuxième priorité, la consolidation des services aux publics.
Pour ce qui concerne l’État, deux Maisons de l’Etat sont, comme je m’y étais engagée, créées, l’une sur l’arrondissement d’Argelès-Gazost, l’autre sur l’arrondissement de Bagnères avec la création d’un nouveau site à Lannemezan.
L’État accompagne et soutient également la création de Maisons de services au public qu’elles soient portées par les collectivités – c’est le cas à Luz, à Trie, à St Lary, et demain à Vic, à Rabastens ou à Sarp – ou qu’elles soient installées dans des bureaux de poste. Ce sera le cas du bureau de poste d’Arreau, à partir du mois d’octobre.
Monsieur le président du conseil départemental, nous avons – comme la loi NOTR nous y engageait – lancé l’élaboration d’un schéma départemental d’accessibilité des services au public.
L’objectif est de chercher ensemble, avec vous, avec les opérateurs, les moyens d’accompagner les transformations qui sont nécessaires, tout en répondant mieux aux attentes de nos concitoyens.
Nous proposerons à l’association des maires et aux présidents des intercommunalités une réunion à la fin du mois de mai pour échanger sur les premiers éléments du diagnostic.
Le Gouvernement a placé la ruralité au centre des préoccupations, en conduisant une politique publique d’ensemble à travers notamment deux comités interministériels aux ruralités, qui ont adopté 67 mesures. Un troisième est prévu mi mai.
Ces mesures – qui concernent les maisons de services aux publics que j’ai déjà évoquées, mais aussi le soutien aux centres bourgs, le développement du très haut débit, la couverture en téléphonie mobile… - sont significatives. Elles doivent être mieux connues et adaptées à chaque territoire.
Dans cette perspective, le ministre en charge de l’aménagement du territoire a demandé à chaque préfet de désigner un sous-préfet référent en matière de ruralité (un peu comme il existe des sous-préfets à la ville..) - dans les Hautes-Pyrénées, j’ai demandé à Gilbert Manciet, sous-préfet de Bagnères, d’être ce sous-préfet référent.
Je réunirai dans une quinzaine de jours, un comité chargé de faire vivre ces mesures et de définir des priorités pour le département. Comme il existe des contrats de ville pour les territoires urbains, c’est vers de véritables « contrats de ruralité », partagés entre l’État et les communes, l’État et les intercommunalités, que nous devrons aller !
3. Il y a aussi un sujet qui me tient à cœur – c’est celui de la jeunesse.
Nous avons ensemble à construire des réponses au besoin d’engagement, au besoin de reconnaissance de notre jeunesse. Des outils existent – vous pouvez vous en saisir. Je pense en particulier, au service civique.
Là aussi, nous avons sans doute à faire en sorte, à partir des expériences existant déjà, que cette opportunité profite encore davantage aux jeunes de ce département. Peut-être certains d’entre vous n’ont pas saisi cette véritable opportunité car il vous semble que les missions ne sont pas claires, que la procédure est complexe et les contraintes trop fortes .... je vous assure que ce n’est pas le cas, et que tout collectivité qui souhaite accueillir un jeune sera accompagnée par les services de l’Etat, et plus précisément la DDCSPP, pour définir le projet, et le mener à bout. Avec cet outil, nous détenons tous l’une des clés du renforcement du lien social, de la cohésion nationale.
Aider la jeunesse et préparer l’avenir cela passe également par l’emploi.
Le chômage des jeunes a baissé de 4 points depuis 3 ans. C’est un beau résultat. Le résultat notamment des programmes développés pour faciliter leur accès à l’emploi – je pense aux emplois d’avenir, auxquels vous avez contribué de façon importante, je pense aussi à la Garantie jeunes qui concerne d’ores et déjà plus de 300 jeunes en grandes difficultés dans le département – plus d’un tiers d’entre eux ont accédé à un emploi dans les 6 premiers mois, et c’est un beau résultat que nous devrons ensemble là aussi continuer à accompagner.
Préparer l’avenir en aidant notre jeunesse est de notre responsabilité.
Nous devons les aider à se construire, comme adultes et comme citoyens. Cela passe aussi par votre responsabilité d’élus de créer ce lien social ciment de la cohésion de notre société, d’entretenir le bien vivre ensemble et de garder en nous cet élan né au lendemain des attentats de 2015, de cultiver la citoyenneté et le respect de l’autre.
Ce sont les clés de l’avenir de notre vivre-ensemble.
Je nous souhaite à tous, malgré tout ce qui fera débat entre nous et à travers tout ce que nous construirons, de continuer à être au service de cette jeunesse, de son avenir et de ses ambitions.
Les contraintes environnementales et la complexité des procédures
Les contraintes environnementales et la complexité des procédures ont été évoquées. Jean-Bech, maire de Camous, estime qu’il y a lieu de trouver un équilibre entre la protection de l’environnement et le développement économique. Il est approuvé par Michel Pélieu qui demande une évolution de la loi. Pour lui, ce n’est plus tenable. Le moindre projet nécessite tout un tas de paperasse et entraîne une perte de temps. Il souligne les nombreux recours concernant les grands projets structurants. Il s’élève notamment contre les attaques systématiques dont sont l’objet les UTN en zone de montagne. Le sénateur François Fortassin y va d’une formule qui fait mouche : « Les djihadistes de l’environnement, ça suffit ! On ne les pas attendus pour savoir ce qu’il convenait de faire pour préserver le patrimoine de nos montagnes et de nos campagnes. On n’en connaît peut-être pas autant qu’eux sur la vie intime du crapaud accoucheur mais pour ce qui concerne nos paysages, nous sommes plus fondés qu’eux ! » Michel Pélieu se demande à quoi servent les élus puisque toutes leurs décisions sont freinées par les normes ou les lois, attaquées par des associations qui reçoivent par ailleurs des subventions de l’Etat.
Quant à la réforme territoriale et des intercommunalités, elle n’a pas suscité de débat. Les maires restant visiblement dans les starting-blocks. Préférant en garder sous le pied. Notamment pour ceux concernés par la grande agglo.
Il ne restait plus aux élus qu’à traverser la rue pour rejoindre le hall du parc des expositions où était servi le repas des maires offert par le conseil départemental. Suivi pour quelques-uns par la visite de la Foire. Où est donc le temps où le repas des maires se terminait par les chansons du terroir ?