Site d’informations en ligne, sur Tarbes et le Grand Tarbes

  Informations Lourdes et Grand Tarbes  Informations Lourdes et Pays de Lourdes  Informations Bagnères de Bigorre  Informations Argelès-Gazost Vallées des Gaves  Informations Pays de Lannemezan  Information Pays du Val Adour  Informations Hautes-Pyrénées     
         

3e session plénière du conseil départemental : une contractualisation financière avec l’Etat qui passe mal !

vendredi 22 juin 2018 par Rédaction

Le conseil départemental s’est réuni ce vendredi matin sous la présidence de Michel Pélieu pour sa troisième réunion de l’année 2018 qui était consacrée à la décision modification n°1, avec un dossier phare, à savoir la contractualisation financière du département avec l’Etat. Un dossier qui fait grincer des dents et qui ressemble pour certains élus à une mise sous tutelle. Avant d’en débattre largement, Michel Pélieu a abordé le sujet dans son discours d’ouverture.

Le discours de Michel Pélieu
Président du Conseil départemental

Mesdames et Messieurs, Chers collègues,

Nous sommes réunis pour la 3e session plénière de l’année consacrée à la décision modificative du budget annuel mais le dossier phare de cette session concerne le contrat financier avec l’Etat.

Vous le savez, l’Etat a proposé de signer avec nous, comme avec toutes les grandes collectivités de France, un contrat financier de trois ans.

Ce contrat prévoit de plafonner à 1,2% la hausse de notre budget de fonctionnement. La carotte, qui ressemble plus à un bâton, consiste à réduire la perte de dotation de l’Etat en cas de dépassement.

Ceux qui ont signé subiront une reprise de 75% du montant du dépassement sur les dotations de l’Etat. Tandis que les non-signataires seront ponctionnés de 100% du dépassement.

Cette proposition de l’Etat, même si elle est totalement innovante, appelle bien sûr plusieurs observations.

Premièrement, et en préalable, je crois qu’il faut bien préciser pour l’opinion publique ce qu’on entend par dépenses de fonctionnement. Notamment, il ne faut pas croire que ça se limite au train de vie de notre Institution ou aux salaires de nos agents. Les dépenses de fonctionnement dont il est question concernent toutes les aides aux familles et à l’enfance, les coûts de fonctionnement des collèges, les cantines, le Service Départemental d’Incendie et de Secours, les interventions dans le domaine de la culture, du sport, du tourisme, etc.

Ce sont ces dépenses qui pourront progresser moins vite que l’inflation.

Ce sont ces services à la population qui devront être diminués par la contrainte de l’Etat.

Deuxièmement, et toujours dans une logique de clarté vis à vis de l’opinion publique, je crois qu’il faut aussi rappeler ce que représente la dépense publique des collectivités locales sur laquelle on concentre autant d’énergie, pour ne pas dire d’acharnement.

Ce dispositif de contrat financier est prévu pour faire contribuer les collectivités locales à l’effort de diminution de la dépense publique et de la dette publique. Je ne suis pas contre la contribution des collectivités locales à l’effort de la nation.

Je ne suis pas contre toute recherche d’économie et d’optimisation budgétaire. Justement, je crois que les collectivités locales ont montré la voie ces dernières années.

La Cour des Comptes, elle-même, qui n’est pas réputée pour être la meilleure ambassadrice de la gestion locale, a reconnu que les collectivités locales avaient accompli ce qui leur était demandé en termes d’efforts de maîtrise ces dernières années, au contraire de l’Etat lui-même.

Aujourd’hui, les collectivités locales représentent 20% de la dépense publique, et leur dette ne pèse que 9 % dans le total de la dette publique.

Et, dans le même temps, elles réalisent 70% de l’investissement public.

Donc, si le syndrome de la dette publique est réel, la cause du mal est surtout ailleurs. Ailleurs que dans les collectivités locales.

Et sans mauvais esprit, je remarque que le budget de fonctionnement de l’Etat a lui augmenté de 2,5%.

Enfin, troisièmement, et parce qu’on peut être élu local et avoir aussi le souci de l’optimisation de l’argent public, le souci d’une saine gestion des deniers publics, j’aurais préféré que la contractualisation avec l’Etat se fasse autour de l’efficacité de l’action publique et de la gestion de notre Institution, plutôt que sur des ratios généraux et rigides.

C’est le moment de rappeler que si on se compare avec les autres Départements de la même strate, c’est-à-dire avec moins de 250 000 habitants, nous avons quelques indicateurs en notre faveur :

- La dette par habitant est, inférieure à la moyenne, alors que dans le même temps on investit plus par habitant.

- Nos charges de personnels et nos charges financières sont inférieures à la moyenne des Départements.

- Notre capacité d’autofinancement est supérieure à la moyenne. Et nous avons obtenu la meilleure note de la région pour la qualité comptable.

Je voudrais rappeler également que la performance de l’action publique ne peut pas s’évaluer uniquement au regard de critères quantitatifs, elle doit prendre en compte des critères qualitatifs.

Oui, demain, je souhaiterais pouvoir augmenter nos dépenses de fonctionnement, au delà de ce qui est prévu par l’Etat, pour créer un dispositif nouveau et innovant qui va permettre de réinsérer socialement et professionnellement des personnes actuellement au chômage.

C’est d’abord une question de dignité pour les personnes elles-mêmes.

C’est aussi une question d’optimisation de l’argent public, pour sortir ces personnes du système d’assistance dans lequel elles sont maintenues, faute de moyens pour mener des politiques d’insertion et de développement économique.

Bref, tout ceci étant dit, je veux préciser, si besoin, que je ne suis pas, et je n’ai jamais été, dans une posture doctrinaire d’opposition et de refus du contrat proposé par l’Etat.

Je suis dans une posture de responsable local, élu démocratiquement au suffrage universel direct. Et fort de cette légitimité, j’entends pouvoir négocier le contrat qui nous est proposé par l’Etat.

Un contrat, par définition, ça se négocie entre les deux parties. Sinon, ce n’est pas un contrat, c’est un acte de cadrage budgétaire imposé par Bercy. Et cela ne serait pas acceptable, car :

- Nous sommes une collectivité locale à part entière.

- Nous ne sommes pas un service de l’Etat.

Voilà pourquoi le contrat que je vous propose de signer est un contrat amendé des quelques évolutions que nous suggérons.

Elles me paraissent être parfaitement raisonnables, et en même temps, indispensables au respect du principe de libre administration des collectivités locales.

Je ne vais pas les détailler, elles seront abordées précisément au moment des débats.

Pour l’essentiel, elles visent :

- D’une part, à nous assurer que nous ne soyons pas contraints sur des dépenses qui dépendent uniquement du gouvernement (telles que les MNA (Mineurs étrangers Non Accompagnés) ou toute autre nouvelle compétence qui pourrait être transférée sans compensation intégrale) ;

- D’autre part, à nous permettre de pouvoir continuer à prendre des mesures intelligentes de saine gestion dont les effets en terme d’économie doivent être évalués sur le long terme (par exemple : un rachat de dette).

Néanmoins, ce faisant, je ne veux pas non plus me cacher derrière mon petit doigt, et je dois vous dire ce que vous savez déjà, que derrière un habillage de contrat se cache une volonté de contrainte de Bercy.

Dans les faits, la marge de négociation laissée aux représentants locaux de l’Etat est quasi-nulle.

Par conséquent, nous devons être conscients qu’on s’expose à un refus possible de l’Etat.

Mais, il faut bien avoir à l’esprit qu’une application des contrats en l’état ne sera pas sans conséquence.

Sur le plan de la symbolique, elle mettra un coup de canif évident à la décentralisation et signera la victoire des logiques comptables et budgétaires de Bercy.

Plus concrètement, elle se traduira immanquablement par des diminutions de services à la population, par des diminutions d’investissements destinés à soutenir l’attractivité des territoires.

Et une fois de plus, ceux qui seront le plus durement touchés seront les territoires ruraux dont les besoins sont plus importants. « Ces territoires abandonnés doivent être des lieux d’expérimentation. Il faut comprendre que les règles produites de manière uniforme par l’Etat et guidées par l’esprit de précaution, c’est l’ennemi d’une ruralité qui ne se bat pas avec les mêmes armes. Ces territoires ont besoin de pouvoir prendre des risques, de tenter, d’expérimenter. » Ces mots ne sont pas les miens mais je les partage à 100%. Ce sont ceux du candidat Emmanuel MACRON.

J’ai été un peu long mais le sujet est important et lourd d’enjeu pour l’avenir.

Je vous remercie pour votre attention.

Michel PÉLIEU,
Président du Département des Hautes-Pyrénées