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Près de 2000 manifestants à Tarbes contre le projet de loi « Travail », ATTAC s’invite à la Société Générale

jeudi 28 avril 2016 par Rédaction

La mobilisation contre le projet de loi « El Khomri » ne faiblit pas dans les Hautes-Pyrénées. Près de 2000 manifestants ont défilé jeudi 28 avril entre la Bourse du Travail et la place de Verdun à Tarbes, à l’appel de l’intersyndicale CGT-FO-FSU-Solidaires, et de la coordination lycéenne. L’association ATTAC 65 et le Collectif « Nuit Debout » ont aussi participé au défilé, et en ont profité pour s’inviter dans une succursale de la Société Générale, afin de dénoncer le rôle joué par les banques concernant l’évasion fiscale.

Une manifestation plus diversifiée et plus inventive, conclue par une action spectaculaire à la Société Générale de Tarbes, et par un discours très offensif des syndicats professionnels. La mobilisation du monde du travail contre le projet de loi « El Khomri » à Tarbes, ce jeudi 28 avril, a rassemblé près de 2000 personnes. Aux côtés des syndicats CGT, FO, FSU, Solidaires, et de quelques lycéens de la coordination tarbaise, de nombreuses associations sont présentes dans le cortège : Ligue de l’Enseignement, ATTAC 65, Action Catholique Ouvrière, sans oublier le collectif « Nuit Debout », qui a carrément appelé à la grève générale au terme du défilé. Les partis de la gauche alternative sont aussi présents. Parmi les nouveaux venus, une banderole signale la présence du syndicat CGT « des remontées mécaniques », qui regroupe les salariés et les saisonniers travaillant au service des skieurs dans les stations bigourdanes. Des militants du syndicat Sud des Caisses d’Epargne ont aussi effectué le déplacement.

« Mères, avons-nous engendré des esclaves ? », interroge la pancarte brandie par une manifestante, marchant à côté d’un papa tenant son bébé sur ses épaules. « Nos vies valent plus que leur profit », assure la pancarte d’un autre participant. Certains slogans établissent un raccourci frappant d’un siècle à l’autre : « 1916, chair à canon ; 2016, chair à patron ». Ils persiflent à propos du président du MEDEF : « ça sent le Gattaz, ça va exploser ». Ou ils lancent un avertissement sans frais : « semez notre misère, récoltez notre colère ». Le ton du défilé est donné. C’est bien la menace qui pèse sur l’humanité, et en particulier sur les jeunes générations, que les manifestants dénoncent. « Les travailleurs sont divisés, écartelés et sous pression. Le travail y perd sa signification. Ces hommes et ces femmes deviennent une variable d’ajustement, un simple facteur de production », affirme le texte diffusé par des militants de l’Action Catholique Ouvrière dans le cortège. « Une loi ne peut être humiliante, oppressive, absurde, mais doit plutôt protéger et offrir des garanties individuelles et collectives, être au service de la société et de l’être humain », conclut cette déclaration de l’ACO. « La loi Travail est une aubaine pour les paradis fiscaux. Elle autorise le licenciement économique dès que l’entreprise connaît une baisse de ses résultats. Non plus au niveau mondial, comme aujourd’hui, mais seulement en France », souligne le texte diffusé par les militants d’ATTAC 65, revêtus de masques et de costumes bariolés. « Pour les groupes du CAC 40, rien de plus facile : en augmentant la part des profits localisée dans un paradis fiscal, on fait chuter les résultats en France ».

René Trusses, président de la Ligue de l’Enseignement des Hautes-Pyrénées, qui mène de nombreuses actions d’éducation populaire, est présent dans la manifestation, aux côtés de deux salariés de l’association. « L’objet central de notre mobilisation est l’emploi. Le secteur associatif, culturel et sportif, auquel nous appartenons, crée davantage d’emplois en France que l’agriculture. Or, il est aujourd’hui menacé par les restrictions budgétaires qui touchent les collectivités territoriales. Cela entraîne des baisses de subventions et une fragilisation de nos finances. La loi El Khomri, en facilitant la précarité professionnelle, sera facteur d’instabilité sociale. Comme employeurs, nous plaidons pour des emplois durables et des conditions de travail décentes ».

Pour la première fois, le collectif citoyen « Nuit Debout » déploie une banderole au cœur de la manifestation. « Nous souhaitons nous impliquer dans les mouvements sociaux », confie Pierre, un jeune habitué des « Nuits Debout » de Tarbes. « Nous profitons aussi de ce défilé pour aller rendre une petite visite à la Société Générale, afin de dénoncer la fuite des capitaux vers les pays « offshore ». Claude participe à la manifestation « pour faire entendre les droits de chaque personne dans ce pays ». Marc défile parce qu’il en a « ras-le-bol de ce gouvernement qui n’écoute plus nos voix ». Françoise, retraitée, se mobilise « par solidarité avec les jeunes de mon entourage, directement touchés par le projet de loi El Khomri ». Elle estime que c’est surtout « le monde de la finance qu’il faudrait enfin changer ».

En tête de cortège, les militants d’ATTAC et les participants aux « Nuits Debout » prennent un peu d’avance pour s’inviter à l’intérieur d’une succursale de la Société Générale, place de Verdun. Ils déploient par dérision autour de la banque un ruban portant ces mots : « zone d’évasion fiscale – les requins.org ». Et ils entrent à l’intérieur de la banque, dans un joyeux concert de slogans et de sifflets, brandissant des pancartes et déposant tracts ou autocollants. « La Société Générale possède 103 agences de « banque privée » en France. Ces agences, dédiées à la « gestion de patrimoine d’une clientèle d’entrepreneurs et de particuliers fortunés », sont un des points de départ de l’évasion fiscale organisée par les banques », précisent les responsables d’ATTAC 65. « Les gens qui manifestent aujourd’hui contre le projet El Khomri ne veulent pas que leur « nécessaire » serve au superflu de tous ces capitaux », lance Philippe, l’un des militants de l’association.

Sur la place de Verdun, les responsables des syndicats CGT, FO, FSU et Solidaires concluent la manifestation par un discours particulièrement offensif. Cette fois-ci, leur porte-parole est Gérard Omer, secrétaire général de FO 65. « Alors que dans sa communication officielle, Matignon a très discrètement baptisé « l’avant-projet de loi sur les nouvelles protections pour les entreprises et les salariés », nous avons trouvé son vrai nom. C’est la loi TGV. T pour travailler plus, G pour gagner moins et V pour être viré tout de suite ». Les syndicats affirment : « aujourd’hui, le Code du travail protège tous les salariés, quelle que soit l’entreprise. Demain, il y’aura autant de codes du travail que d’entreprises. On verra alors la durée maximale du travail journalier passer de 10 à 12 heures. La durée maximale de travail hebdomadaire passer de 48 à 60 heures. Et les heures supplémentaires majorées à 25% ou 50% passer à 10% ». Les organisations syndicales lancent l’appel à la mobilisation générale contre ce projet. « Partout, dans les entreprises, les administrations, les lycées, les universités, les quartiers, organisons-nous pour la poursuite du mouvement. Comme ce fut le cas dans le passé, l’avenir est entre nos mains. Favoriser la création d’emploi pérenne, et non pas flexibiliser encore plus la règlementation du travail au détriment des salariés, c’est possible. Gagner le retrait, c’est possible ».

François Dousseau, secrétaire de l’UD CGT, lance à son tour un appel aux participants à se retrouver pour le défilé du 1er mai, en soulignant le caractère intersyndical exceptionnel de ce rendez-vous « aux côtés de FO, de FSU et de Solidaires ». Les syndicats professionnels proposent à Pierre, représentant du collectif « Nuit Debout », de prendre à son tour la parole. Il en profite pour lancer un appel à la grève générale, et donne aussi rendez-vous au public pour la troisième « Nuit Debout », vendredi 29 avril à 19h devant la place de l’Hôtel de Ville de Tarbes. « Nous commencerons à débattre ensemble autour d’un projet de constitution, à faire remonter ensuite au niveau national. Nous sommes confrontés à une tentative de révolution conservatrice lancée par le MEDEF. A nous de réagir et de proposer une autre voie pour l’avenir ! ».

Jean-François Courtille