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Le grand maître du sitar indien enchante le Parvis

vendredi 6 novembre 2015 par Rédaction

Nishat Khan, virtuose du sitar, instrument de musique traditionnelle indienne, a enchanté les spectateurs du Parvis jeudi soir, lors de son concert. Après ses répétitions, jeudi après-midi, nous avons eu avec lui un entretien en anglais. Une langue qu’il maîtrise parfaitement. L’occasion de l’interroger sur sa vision de la musique et du dialogue entre les cultures artistiques.

Assis en tailleur sur la scène, les pieds nus, Nishat Khan laisse glisser ses doigts avec agilité et fermeté sur son sitar, dont il tire des sons proches de la voix humaine. Face à un public d’abord surpris par les mélodies inhabituelles, puis fasciné, le musicien indien alterne les phases méditatives et les envolées lyriques voisines du flamenco. Pendant son dialogue musical avec le joueur de tabla Shahbaz Hussain, il laisse rayonner sa joie communicative. A certains moments, Nishat Khan gratifie aussi l’assistance de quelques chants soufis.

En l’écoutant jouer, on songe à l’apport musical du célèbre Ravi Shankar aux grands guitaristes de rock des années 1960, comme Robbie Krieger, Paul Mac Cartney ou John Lennon. La musique de Nishat Khan est à la fois profondément exotique et curieusement familière. Le public du Parvis ne s’y trompe pas, et réserve un salut chaleureux aux deux artistes à la fin du spectacle. L’interview du maître contemporain du sitar nous éclaire sur la richesse de son art et sur la diversité de ses influences.

Quelle est l’origine du sitar, et quelles possibilités offre cet instrument ?

Le sitar a été inventé par un grand musicien iranien, Amir Khosro. Il s’était inspiré lui-même d’un instrument traditionnel indien, la vina. Khosro a créé un nouvel instrument en s’appuyant sur sa manière de jouer de la musique. Depuis plus de quatre siècles, ma famille a suivi ses traces en pratiquant et développant l’art du sitar. Chaque génération de musicien a apporté une innovation. Cet instrument offre de multiples possibilités de création musicale. Il ne se joue pas de la même manière que les instruments à corde occidentaux. Le langage musical des raga-s nous permet, avec le sitar, de tisser des variations infinies à partir d’une note centrale et continue. Sur scène, un musicien indien peut commencer avec un morceau de 45 minutes, puis raccourcir les morceaux suivants. Il cherche à transmettre des émotions au public, plutôt qu’à composer des mélodies. L’artiste s’adapte aussi à la configuration du lieu dans lequel il joue. Aucun concert ne ressemble à un autre, c’est une musique en évolution permanente ! Et pour un musicien indien, la rencontre avec le public est une surprise perpétuelle.

Vous avez joué avec de grands musiciens occidentaux comme Paco de Lucia ou John Mac Laughlin. Quel est selon vous l’intérêt de la rencontre entre des musiciens de cultures différentes ? Et comment une telle rencontre devient-elle possible ?

Pour jouer avec un autre musicien, il faut d’abord aimer sa musique. Aucune rencontre n’est possible sans cela. J’apprécie des musiciens classiques occidentaux comme Debussy ou Schumann, et des musiciens de jazz comme John Coltrane. J’ai aussi une grande attirance pour le flamenco, une musique dont les racines sont d’ailleurs asiatiques. Mais on ne peut pas mélanger plusieurs musiques ensemble comme on confectionne un « milkshake ». Chaque musicien arrive avec sa propre culture et sa propre sensibilité. Et le dialogue avec l’autre tradition musicale est le fruit d’une affinité mutuelle.

Que représente pour vous le fait de venir jouer en France, et notamment dans une région de montagne comme les Pyrénées ?

J’aime beaucoup la France, car je trouve que son public a un rapport intéressant avec la musique. Quand je donne un concert, j’ai le sentiment que les spectateurs intériorisent profondément la musique, un peu comme s’il s’agissait d’une démarche spirituelle. C’est quelque chose de très stimulant pour un artiste. Je suis heureux de venir jouer dans les Pyrénées, car c’est un endroit magnifique, proche de l’Atlantique et de l’Espagne. Une région qui facilite naturellement la rencontre entre des cultures différentes.

Avez-vous envie de transmettre votre art à d’autres personnes ? Quelle est votre vision de l’éducation à la musique ?

Je fais partie d’une famille au sein de laquelle la transmission de l’éducation musicale a été primordiale à travers plusieurs générations. Aussi, je pense qu’il est important d’aider le public à découvrir la musique. Pour apprendre à jouer d’un instrument, il faut y trouver du sens et du plaisir. Le sitar est un instrument de musique difficile d’accès. Mais il offre une grande place à l’improvisation et à la créativité.

Propos recueillis par Jean-François Courtille